Les Bourses mondiales évoluent dans le rouge mercredi, lestées par les inquiétudes liées à de nouvelles restrictions commerciales venues de plusieurs fronts, des minerais à l'export de semi-conducteurs vers la Chine côté Washington, et sur les achats d'avions Boeing et les envois de colis vers les Etats-Unis côté Pékin et Hong Kong.
En Europe, dans les premiers échanges, la Bourse de Paris perdait 0,63%, Francfort 0,60%, Londres 0,19% et Milan 0,66%.
En Asie, la Bourse de Tokyo a terminé en baisse de 1,01%. Les places chinoises piquaient du nez: l'indice hongkongais Hang Seng perdait 1,96%, Shenzhen 0,84% et Shanghai restait proche de l'équilibre, grappillant 0,14%.
"L'ambiance du marché est redevenue plus négative (...) alors que les tensions entre les États-Unis et la Chine montrent des signes d'escalade", a commenté Jim Reid, économiste à la Deutsche Bank.
"La balle est dans le camp de la Chine" sur la question des droits de douane américains, a assuré mardi la Maison-Blanche, alors que Pékin continue de mettre la pression sur Washington.
La Chine, qui riposte systématiquement aux surtaxes douanières américaines, a suspendu toute réception d'avions fabriqués par le constructeur américain Boeing. La Poste de Hong Kong a de son côté annoncé mercredi qu'elle suspendait les envois de colis à destination des Etats-Unis.
Le président américain Donald Trump a aussi ouvert mardi une enquête sur les "effets sur la sécurité nationale" de l'importation de minerais critiques ainsi que les "produits dérivés", comme les smartphones ou les véhicules électriques, selon la Maison-Blanche.
Chine et Etats-Unis sont entrés dans une surenchère de droits de douane. Washington a imposé des surtaxes de 145% sur les produits chinois entrant sur son territoire, en plus de ceux existants avant le retour de M. Trump à la Maison-Blanche. Pékin a répliqué avec un taux qui atteint désormais 125%.
La Chine a par ailleurs fait état mercredi d'une santé économique meilleure qu'attendu au premier trimestre, stimulée par les expéditions anticipées de marchandises avant les nouvelles exorbitantes surtaxes douanières de M. Trump, qui mettent la "pression", a reconnu Pékin.
"Plus les données économiques chinoises sont solides, moins la Chine a de chances de céder aux exigences américaines", a noté Ipek Ozkardeskaya, analyste chez Swissquote Bank.
Sur d'autres fronts, "il n'y a pas eu de signe d'avancée entre les États-Unis et l'Union européenne non plus", a rappelé Jim Reid.
Même en partie retardée avec la suspension de 90 jours d'un certain nombre de surtaxes, la guerre commerciale planera sans nul doute jeudi sur les débats à la Banque centrale européenne (BCE) au moment de déterminer ses taux d'intérêt.
La tech voit rouge
Les titres technologiques souffrent particulièrement, après l'annonce de nouvelles restrictions américaines sur les exportations de semi-conducteurs vers la Chine.
Cela pourrait coûter 5,5 milliards de dollars de charge exceptionnelle au premier trimestre au géant américain des puces Nvidia. Le cours de son action a perdu plus de 5% lors des échanges après la clôture mardi de la Bourse de New York.
"En réponse, la Chine pourrait bien restreindre ses exportations de métaux rares et autres matières premières essentielles à la fabrication de puces et de machines vers les États-Unis", a signalé Mme Ozkardeskaya.
Les titres asiatiques liés aux semi-conducteurs ont dégringolé mercredi, à l'image d'Advantest (-6,55%), Disco Corp (-8,00%) ou Sumco (-5,95%) à Tokyo, ou de SK Hynix (-3,65%) à Séoul.
Nouveau record de l'or
"Sans surprise, l’escalade des tensions commerciales continue de stimuler l’appétit pour l'or", actif considéré comme la valeur refuge par excellence, a souligné Mme Ozkardeskaya.
L'once d'or s'est hissée mercredi à un nouveau record historique, à plus de 3.297 dollars. Vers 07H10 GMT, elle prenait 1,89% à 3.291 dollars.
"Les fonds spéculatifs américains vendent non seulement des actions américaines, mais aussi des actions européennes pour se porter sur l'or (...), le franc suisse et à la surprise générale l'euro qui devient une valeur refuge", a relevé Christopher Dembik, conseiller en stratégie d'investissement chez Pictet AM.
Le dollar à la peine
Le dollar souffre d'une "érosion de la confiance" des investisseurs, selon Stephen Innes, analyste chez SPI AM.
"Qu'il s’agisse du lancement chaotique des politiques douanières, de l’utilisation d'outils commerciaux comme armes sans cadre de négociation clair, ou de la diplomatie américaine de plus en plus binaire, la base mondiale des investisseurs observe attentivement et recalibre ses choix", remettant en question la réputation de valeur refuge du dollar, a-t-il expliqué.
Depuis le fameux "jour de la libération" le 2 avril dernier, date de l'annonce des droits de douane américains colossaux visant les importations de la plupart des pays et déjà partiellement suspendus, le dollar a cédé environ 5% face à l'euro.
Mercredi, vers 07H10 GMT, le billet vert perdait 0,72% face à la monnaie unique européenne, à 1,1365 dollar pour un euro.
O.Dupont--LCdB